Acte II de la crise agricole : « Si tous les Français achetaient un fromage bio par mois, il n’y aurait plus de crise »
2024-11-17
Auteur: Jean
Les agriculteurs se mobilisent à nouveau
Les agriculteurs se mobilisent à nouveau dans les rues françaises. Un an après un mouvement historique, éleveurs, céréaliers et maraîchers expriment leur détresse face à des conditions de travail qui ne cessent de se dégrader. Dans cette édition, nous partageons des témoignages poignants des premiers concernés qui font état de leurs luttes contre les aléas climatiques, les crises sanitaires, des normes jugées écrasantes et une concurrence internationale de plus en plus pressante.
Témoignage de François Marchand
François Marchand, céréalien et président de l’association Bios de Meuse, affiliée à la Fédération nationale d’agriculture biologique, aborde la situation.
« La saison a été particulièrement difficile. À 63 ans, après avoir été installé depuis 1983, mon fils a repris l’exploitation. J’ai connu des années humides, mais celle-ci est sans précédent. Il n’a pratiquement pas cessé de pleuvoir pendant un an. Les fenêtres d’activité étaient très limitées, et malgré toutes les précipitations accumulées pendant l’hiver et le printemps, la pluie continuait d’arriver. Nous avons enregistré plus d’un mètre de pluie !
« Les terres inondées compliquent considérablement notre travail, parfois même le rendent impossible. Nous n’avons jamais réussi à intervenir dans de bonnes conditions, et nos rendements sont en chute libre. En blé d’hiver, nous avons obtenu seulement 2 tonnes par hectare, alors que les rendements normaux varient entre 3 et 3,5 tonnes. Pour le maïs, nous devrions atteindre au moins 6 tonnes par hectare; pour l’instant, nous sommes à 4.
« Malheureusement, les prix s’effondrent. Lorsque j’ai commencé l’agriculture biologique, on me parlait d’équité dans ce secteur. Les prix en coopérative tournaient autour de 400 à 450 euros la tonne de blé ; aujourd'hui, nous sommes tombés à 300 euros. Cette équité a disparu de manière alarmante. En outre, la France importe désormais des blés bon marché de l’étranger, ce qui amène à se poser des questions sur notre rentabilité. Tout cela n’a plus de sens économiquement.
« La crise de la demande suite à la pandémie de Covid-19 a également affecté la situation. Par ailleurs, la grande distribution joue un rôle crucial. Les rayons bio sont quasiment vides ! Si chaque Français achetait un fromage bio par mois, cela pourrait véritablement transformer la donne et mettre un terme à cette crise.
« Personnellement, je ne prends pas part aux manifestations. J’ambitionne de trouver des solutions plutôt que de me lamenter. Je suis conscient des difficultés dans le Sud-Ouest et dans le secteur de l’élevage, mais j’ai observé certaines filières se plaindre alors qu’elles ne partagent pas les mêmes problèmes que nous. Cette année a été décevante, mais il ne faut pas oublier que la vie est faite de hauts et de bas.
« Ce qui me choque, c’est la minimisation des problèmes liés à la pollution de l’eau causée par divers produits chimiques. Que faisons-nous face à cela ? Bien que je ne sois pas pour une agriculture uniquement bio, un équilibre est à établir. Je suis particulièrement opposé à l’accord Mercosur. Cela revient à demander aux agriculteurs français de respecter des normes strictes, tandis que d’autres pays peuvent produire sans tenir compte de telles exigences. Il est inacceptable d’importer des produits qui ne respectent aucune norme sanitaire ou sociale.
Conclusion
La situation des agriculteurs demeure critique, et leur demande de soutien prend plus d'ampleur. Le consommateur a un rôle essentiel à jouer dans ce système en choisissant des produits qui encouragent une agriculture durable et équitable.