Cuivre, cobalt, lithium : la France doit-elle se réveiller sur ses trésors cachés ?
2024-11-21
Auteur: Léa
Le 20 novembre 2024, un rapport du cabinet Oliver Wyman a révélé des failles inquiétantes dans la gestion des ressources métalliques recyclables par la France, souvent désignées comme « mines urbaines ». En cette période cruciale de transition énergétique, où la demande de matériaux stratégiques comme le cuivre, le cobalt et le lithium ne cesse d'augmenter, cette inaction soulève de sérieuses questions sur l'avenir économique du pays.
Les déchets, une richesse inexploitable ?
Les mines urbaines constituent une opportunité d'une valeur inestimable. Elles regorgent de métaux précieux extraits des déchets électroniques, des voitures hors d'usage et des bâtiments démolis. Chaque année, 218 000 tonnes de déchets de cuivre sont collectées en France, mais seulement 66 000 tonnes sont recyclées localement. Les 206 000 tonnes restantes partent à l'étranger, notamment pour la Belgique, l'Allemagne et l'Italie, privant ainsi l'industrie française d'une ressource stratégique essentielle.
Un potentiel économique non négligeable
En reliant l’augmentation du recyclage à la réduction du déficit commercial, le rapport indique que doubler le recyclage en France pourrait également contribuer à réduire le déficit commercial de 3 %. Cela renforcerait non seulement l'autonomie économique nationale mais également la croissance durable en améliorant la sécurité d'approvisionnement.
Les défis à surmonter pour améliorer le recyclage
La situation actuelle du recyclage des métaux en France est freinée par plusieurs facteurs clés :
1. **Infrastructures insuffisantes** : La France ne dispose actuellement que d'un site de recyclage de cuivre, à Lens, géré par le groupe Nexans. Bien qu'il soit prévu d'augmenter sa capacité à 80 000 tonnes par an d'ici 2026, cela reste dérisoire au regard des besoins croissants.
2. **Manque de législation incitative** : Contrairement à d'autres matériaux, les industries qui consomment des métaux ne sont pas tenues d'intégrer des matières recyclées dans leur production. Cela limite le développement des circuits de collecte et de tri en France.
3. **Dépendance aux marchés extérieurs** : La Chine domine 70 % du marché mondial de prétraitement des métaux critiques. Cela implique que la France, ainsi que l'Europe, soient vulnérables aux fluctuations des marchés internationaux, notamment pour des ressources aussi vitales que le cuivre.
Une nécessité stratégique pour l'avenir
L'absence de cette exploitation du potentiel des mines urbaines non seulement paralyse l'industrie française mais compromet aussi la transition écologique. Selon l'Ademe, la demande de cuivre et d'aluminium en Europe pourrait croître de 1 à 1,4 % par an d'ici 2030, ce qui rend le recyclage encore plus crucial. Les prévisions de l'Agence internationale de l'énergie (AIE) suggèrent qu'un accroissement du recyclage pourrait réduire de 40 % la demande de métaux vierges pour le cuivre et de 25 % pour le lithium d'ici 2050.
Bien que des initiatives comme l'investissement de 90 millions d'euros par Nexans pour améliorer son usine de recyclage à Lens soient positives, elles restent largement insuffisantes. Le projet d'Eramet visant à recycler des batteries électriques a été suspendu, soulignant une fois de plus le besoin crucial d'une coordination entre innovation technologique et stratégie économique.
Vers une exploitation optimale : des solutions à envisager
Pour maximiser le potentiel des mines urbaines, voici quelques pistes à envisager :
- **Investissement dans la technologie** : La mise en œuvre de technologies avancées comme l'hydrométallurgie pour le traitement des alliages complexes pourrait révolutionner le recyclage.
- **Législation restrictive** : Il serait bienvenu d'introduire des obligations réglementaires imposant un certain pourcentage de matériaux recyclés dans la production industrielle.
- **Création d'un marché européen du recyclage** : Promouvoir des synergies entre les États membres pourrait permettre de mutualiser les ressources et d'assurer des débouchés stables pour les matériaux recyclés.
Conclusion
La France, en maximisant l'exploitation de ses déchets, pourrait non seulement renforcer sa souveraineté économique mais aussi devenir un leader dans le domaine de l'économie circulaire, une mouvance qui semble désormais inéluctable.