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En Tunisie, la victoire écrasante de Kaïs Saïed : Élections controversées ou plébiscite ?

2024-10-06

Auteur: Marie

Le scrutin présidentiel qui a eu lieu le dimanche 6 octobre en Tunisie semblait être joué d’avance. Dès le début de la soirée, la télévision nationale a révélé un sondage de sortie des urnes, annonçant la réélection du président sortant, Kaïs Saïed, avec un impressionnant 89,2 % des voix. Les deux candidats restants, Zouhair Maghzaoui, ancien député et dirigeant du parti panarabe Mouvement du peuple, et Ayachi Zammel, chef d’un petit parti libéral, ont respectivement obtenu seulement 6,9 % et 3,9 % des voix. Ce dernier fait face à de graves accusations de falsification des parrainages, d'où sa condamnation à douze ans de prison récemment prononcée.

Les résultats définitifs devraient être annoncés par l'Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE) d'ici le 9 novembre. Cependant, la victoire déclarée de Saïed a été rapidement contestée par Ayachi Zammel qui a dénoncé la diffusion prématurée des sondages, indiquant qu'elle violaient la loi dans le but de manipuler l’opinion publique. Maghzaoui, pour sa part, a appelé à la protection du processus électoral suite à des résultats qu'il considère erronés.

Avec un taux de participation de 27,7 % (soit environ 2,7 millions d'électeurs), ce chiffre est supérieur à celui des dernières élections législatives, mais reste bien en deçà des 49 % enregistrés lors du premier tour de la présidentielle de 2019. Ce faible engouement peut notamment s’expliquer par le climat politique actuel et un certain désenchantement démocratique chez les jeunes.

La journée électorale a été globalement calme. À Tunis, de vieux électeurs se relayaient pour voter, tandis que d'autres, comme un jeune étudiant de 27 ans, se disaient inquiets du tournant autocratique que prend le pays depuis l'ascension de Saïed au pouvoir. En effet, depuis qu'il a consolidé son autorité en juillet 2021, de nombreuses institutions démocratiques ont été mises à mal.

Plus alarmant encore, cette élection s’est déroulée sans la présence d’observateurs de l’Union européenne pour la première fois depuis 2011, ce qui a suscité de vives inquiétudes au sein de la communauté internationale. Les rapports d'irrégularités et de malversations, comme des tentatives d'influence sur les électeurs, commencent à émerger, mettant en lumière les ténèbres qui planent sur ce scrutin.

Les lendemains d'élections s'annoncent tumultueux pour Kaïs Saïed, qui devra confronté à une opposition montante et à des mouvements de contestation de plus en plus déterminés. Les chances d’un véritable progrès démocratique en Tunisie semblent plus fragiles que jamais. La nation, qui a tant espéré après sa révolution de 2011, se trouve à un carrefour décisif. La question demeure : ce plébiscite est-il le signe d'une légitimité retrouvée ou le début d'une ère d'obscurantisme politique ?