Divertissement

François Ozon : « Je suis fasciné par les actrices qui assument leur âge »

2024-09-30

Auteur: Louis

Un film par an ou presque, François Ozon est l'une des figures les plus prolifiques du cinéma français. Il oscille avec aisance entre comédies délirantes – comme Mon crime, récemment salué par la critique – et d'importantes œuvres sociétales, tel l'inoubliable Grâce à Dieu. Avec son dernier thriller Quand vient l'automne, Ozon explore des territoires moins fréquentés en mettant en lumière la vie de deux femmes septuagénaires, un choix audacieux pour le grand écran.

Les actrices Josiane Balasko et Hélène Vincent incarnent Marie-Claude et Michelle, des amies de longue date qui vivent paisiblement à la campagne. Leur existence tranquille bascule lorsqu'un accident tragique se produit : en préparant un plat à base de champignons, Michelle empoisonne accidentellement sa fille, avec qui elle a toujours eu des relations tendues. Ce récit captivant révèle les secrets de famille enfouis et aborde des thématiques telles que la culpabilité et les fantômes du passé.

Dans une interview, François Ozon évoque comment son enfance a inspiré ce film. "J'ai assisté à un repas de famille où ma tante avait préparé des champignons et tout le monde est tombé malade, sauf elle. Cela m'a fait réfléchir à la notion de mortalité et de regret dans la cuisine," révèle-t-il. La dynamique des relations familiales, avec leurs non-dits et leurs névroses, est au cœur de son récit.

Ozon souligne l’importance de donner la vedette à des actrices d’âge mûr. « Nous voyons trop peu de personnes âgées à l’écran. J'étais désireux de travailler avec des femmes qui assument pleinement leur âge. Hélène et Josiane n’ont pas recours à la chirurgie esthétique ; elles représentent la vie dans toute sa réalité, au-delà des normes de beauté imposées par la société. »

Il aborde également l’évolution du regard porté sur les actrices plus âgées. « Lorsque j’ai réalisé Sous le sable avec Charlotte Rampling, j’ai essuyé beaucoup de critiques. Aujourd’hui, des actrices comme Catherine Deneuve et Isabelle Huppert ont ouvert la voie, mais cela reste un chemin semé d'embûches. »

Ozon précise que les stéréotypes entourant les personnages féminins dans le cinéma sont de plus en plus remis en question, mais que beaucoup de travail reste à faire. "Les femmes sont souvent vues à travers un prisme réducteur. Elles possèdent une profondeur et une complexité qui méritent d’être explorées. Dans Quand vient l’automne, je voulais donner une voix à ces femmes qui ont vécu des choses sur lesquelles on ne s'attarde que trop rarement."

Il continue en déplorant la simplification excessive des vieilles générations : « Les stéréotypes sur les grands-parents sont trompeurs. Ils ont aussi leur lot d'expériences et de secrets. Il est fondamental de les voir comme des individus complexes, pas seulement comme des figures idéalisées. »

François Ozon, souvent décrit comme un cinéaste protéiforme, ne se limite pas à un genre. « C'est l'histoire qui dicte le genre, et j'aime explorer de nouvelles voies. Après la comédie de Mon Crime, j'avais envie de quelque chose de plus ancré dans la réalité. »

Enfin, alors qu’il célèbre les 25 ans de son premier long-métrage Sitcom, le réalisateur se remémore son parcours. « J’ai connu des moments de rejet, mais aujourd’hui, je regarde mes premiers films avec tendresse, comme un père pour ses enfants. » Quand vient l’automne s’annonçant comme une œuvre essentielle de sa filmographie, Ozon nous rappelle de façon poignante que le passage du temps n’est pas synonyme d’effacement, mais d’enrichissement des personnages et des histoires.