Le glaucome, une maladie oculaire insidieuse, touche entre 1 et 2 % des personnes de plus de 40 ans en France, et ce pourcentage grimpe à environ 10 % après 70 ans. Actuellement, environ 800 000 cas de glaucome sont traités, mais une zone d'ombre subsiste : entre 400 000 et 500 000 personnes vivent avec cette affection sans en avoir conscience. Cette situation est d'autant plus alarmante qu'avec le vieillissement de la population, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) prévoit une augmentation de 30 % du nombre de cas entre 2020 et 2030, ce qui pourrait atteindre 95 millions de patients dans le monde.

Le glaucome est souvent qualifié de "maladie silencieuse". Cette affection chronique entraîne une pression intraoculaire excessive, provoquant des lésions du nerf optique et une réduction progressive du champ de vision. La perte de vision peut être si lente qu'elle demeure asymptomatique pendant des années, rendant ainsi son diagnostic précoce d'autant plus crucial. En effet, sans un examen ophtalmologique régulier, le glaucome peut évoluer vers une déficience visuelle et, dans les cas les plus graves, vers la cécité complète.

Il existe principalement deux types de glaucome : le glaucome primitif à angle ouvert, représentant 90 % des cas en Europe, et le glaucome par fermeture de l’angle, plus rarissime. Divers facteurs, dont l’âge, les antécédents familiaux, certaines conditions médicales comme la forte myopie et l'utilisation prolongée de corticostéroïdes augmentent le risque de développer un glaucome à angle ouvert.

Josée Gaillard, présidente de l'association France Glaucome, met en lumière l'urgente nécessité de sensibiliser le public à cette maladie invisibile : "La moitié des cas en France ne sont pas diagnostiqués. Cette situation est préoccupante car un diagnostic tardif peut mener à des handicaps visuels énormes".

En réponse à cette crise imminente, un groupe d'experts en ophtalmologie, en collaboration avec des associations de patients, a présenté neuf propositions ambitieuses. Ces recommandations visent à promouvoir le dépistage précoce du glaucome à partir de 40 ans, en particulier pour les personnes à risque.

Les mesures incluent des campagnes de sensibilisation et l’intégration d'un questionnaire sur les antécédents familiaux dans le bilan de prévention. Les experts plaident également pour un meilleur accès à l'innovation médicale, notamment en matière de recherche et de traitements chirurgicaux, en particulier pour ceux qui échouent aux thérapies classiques.

Le Professeur Florent Aptel, ophtalmologue au CHU de Perpignan, affirme : "La France souffre d’un retard significatif en matière d'accès à l’innovation pour les traitements du glaucome. Il est temps d'agir pour rattraper ce désavantage." De plus, le développement de centres de rééducation basse vision est jugé prioritaire pour les patients atteints.

Enfin, les experts proposent de reconnaître le glaucome comme une maladie handicapante et suggèrent que certains glaucomes évolués soient classés comme Affections de Longue Durée exonérées, permettant ainsi un meilleur soutien pour les patients concernés. Dans un monde où la santé oculaire est souvent négligée, il est impératif d'agir avant qu'il ne soit trop tard.