Nation

Les fleuristes, victimes ignorées des pesticides : « Si l'on m'avait mise en garde, ma fille serait encore là »

2024-10-09

Auteur: Marie

Emmy a fait promettre à sa mère, Laure Marivain, d'« aller au bout ». Emmy est tragiquement décédée le 12 mars 2022, après une lutte acharnée de sept ans contre un cancer. Elle n'avait que 11 ans. « Aller au bout » signifie se battre pour faire connaître sa vérité, avec une audience prévue le 9 octobre à 14 heures devant la cour d'appel de Rennes. Dans la nouvelle maison familiale située dans la région nantaise, les photos d'Emmy, souriante avec son frère et sa sœur, rappellent à quel point elle aurait aimé découvrir ce nouvel endroit. Laure Marivain veut faire savoir que la maladie d'Emmy n'est pas survenue « par hasard », comme le lui avaient dit certains médecins. Elle souhaite également « lever un tabou » sur l'exposition des professionnels de la fleur aux pesticides. « Si l'on m'avait mise en garde, ma fille serait encore là » : Laure, qui a été fleuriste de 2004 à 2008 puis représentante de fleurs de 2008 à 2011 dans les Pays de la Loire, se sent coupable par omission.

Emmy est le premier enfant dont la mort est reconnue par le Fonds d’indemnisation des victimes de pesticides (FIVP). Le FIVP a admis « le lien de causalité entre la pathologie [d’Emmy] et son exposition aux pesticides durant la période prénatale ». Ceci marque une première historique tant pour une victime décédée que pour un professionnel de la fleur.

Cependant, l'indemnisation proposée par le FIVP ne prend en compte que les préjudices des « ayants droit », offrant une somme forfaitaire de 25 000 euros à chacun des parents de l’enfant décédé. Cette indemnisation est contestée par Laure Marivain et son époux devant la cour d'appel de Rennes, car ils estiment que cette somme ne reflète en rien la souffrance endurée. « C’est comme si Emmy et sa famille n’avaient pas souffert pendant toutes ces années », déclare François Lafforgue, l’avocat des Marivain.

Le parcours médical d’Emmy a été long et éprouvant. Entre son diagnostic de leucémie aiguë lymphoblastique B en janvier 2015 et son décès, elle a connu une rémission complète suivie de trois rechutes, passant 468 jours au service d’oncologie pédiatrique du CHU de Nantes. Durant cette période, elle a subi des douleurs lombaires, des sciatiques, des céphalées, des vomissements, ainsi que des séances de chimiothérapie éprouvantes, entraînant perte de cheveux, perte de poids, isolement social et angoisse constante de mourir. Le calvaire d’Emmy est consigné dans des rapports médicaux, mais celui de sa famille reste invisible et inécouté.

La Mutualité sociale agricole, gestionnaire du FIVP, a été contactée, mais ne souhaite pas commenter la politique d’indemnisation du fonds créé par la loi. Cette tragédie soulève la question urgente de la sensibilisation aux risques liés aux pesticides, en particulier pour ceux travaillant dans la floriculture. La voix de Laure Marivain est un appel à reconnaître la réalité d’un combat souvent ignoré, celui des victimes invisibles des pesticides.