Seconde Guerre mondiale : Comment un "Warum" a sauvé Henri Mosson, 100 ans, dans le seul camp de concentration français
2024-11-24
Auteur: Chloé
Bientôt quatre-vingt-un ans. Bientôt quatre-vingt-un ans qu'Henri Mosson a franchi les grilles du seul camp de concentration en France géré par les nazis. Ce 26 novembre 1943, à l'âge de 19 ans, il se retrouve au Struthof, en Alsace, après avoir été condamné à mort pour ses actes de résistance.
Le commandant du camp avait déclaré : "Vous êtes des voyous. Vous êtes entrés ici par la grande porte et vous ressortirez par la cheminée." Aujourd'hui, à 101 ans, Henri est l'un des derniers rescapés de cette sombre période de notre histoire, toujours prêt à témoigner de son vécu.
« La durée de vie était en moyenne de 90 jours. »
Au camp de Natzwiller-Struthof, Henri se souvient de son numéro d'identification, le 6290. Sa connaissance de l'allemand lui a sauvé la vie. "On avait nos numéros à coudre sur nos vêtements, mais je l'ai cousu de travers. C'est alors que j'ai reçu la plus grande claque de ma vie, et j'ai lancé un 'Warum?' au SS. Cela a attiré son attention et il a compris que je parlais allemand. J'ai été alors affecté à la désinfection des vêtements des nouveaux arrivants, ce qui était en quelque sorte une planque."
Henri explique que pour ceux qui ne parlaient pas allemand, la durée de vie au camp était tragiquement courte, certaines victimes ne survivant pas plus de trois jours. Chaque jour, les prisonniers devaient ramasser les corps de ceux qui étaient tombés, les ramenant sur leur dos. "On devient absolument insensible", se souvient-il, en évoquant les horreurs vécues.
Engagé dans la Résistance dès l'âge de 17 ans, Henri a été arrêté près de Dijon et condamné à mort. Il raconte avec une ironie poignante : "J'ai fait connaissance avec la rigueur nazie : mes tortionnaires me suspendaient par les mains pendant des heures. Le matin, mes pieds touchaient à peine le sol et le soir, ils touchaient bien."
Après avoir échappé à l'exécution, il est envoyé au fort de Romainville, une réserve d'otages, où il a également frôlé la mort. "Ma seule motivation était de passer la journée et de résister. J'ai toujours eu espoir."
Fin août 1944, avec l'approche des Alliés, les nazis commencent à évacuer les camps, transférant les détenus vers d'autres endroits, dont celui de Munich-Allach. "Un jour, on s'est réveillé et il n'y avait plus de gardiens", se souvient Henri avec une certaine nostalgie.
Cependant, à son retour en France, l'accueil était loin d'être chaleureux. Les gens les regardaient d'un air curieux. ''Je pesais 38 kg quand je suis rentré en Bourgogne. Nous ne mangions que du bouillon de choux-raves, et à la fin, même les orties en bouillon étaient une rareté.'' Malgré ces débuts difficiles, Henri s'est reconstruit. Passionné de sport mécanique, il est devenu contrôleur technique pour des Formule 1 et a eu la chance de rencontrer des légendes comme Alain Prost et Ayrton Senna. "J'ai fait trois fois le tour du monde", dit-il, fier de son parcours après tant d'événements tragiques.
Henri Mosson est un exemple vivace de résilience et de survie, cette mémoire essentielle que nous devons conserver vivante.