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INTERVIEW. Guerre en Ukraine : l'autorisation d'utiliser les missiles longue portée, un symbole fort mais pas un tournant décisif selon un expert

2024-11-18

Auteur: Jean

Dans une interview accordée le 18 novembre à franceinfo, Ulrich Bounat, géopolitologue spécialisé sur l'Europe centrale et de l'est, a commenté l'autorisation donnée par Joe Biden à l'Ukraine d'utiliser des missiles longue portée contre des cibles en Russie. Selon lui, cette décision n'est pas un véritable "tournant militaire", mais revêt une grande importance symbolique sur le plan politique.

Bounat souligne que les Russes s'étaient probablement préparés à cette éventualité depuis des mois, notant que plusieurs de leurs bases aériennes ont été déployées plus loin pour éviter d'être touchées. "Cela va permettre à l'Ukraine de frapper des dépôts de munitions ou des regroupements de troupes, mais l'impact stratégique ne sera pas aussi significatif qu'il aurait pu l'être auparavant", explique-t-il.

Alors que les États-Unis font un pas vers une implication accrue, il doit être noté que la décision pourrait également avoir des implications sur les négociations futures. Lorsqu'on lui a demandé quel impact cela aura dans le cadre des discussions de paix potentielles, Bounat a répondu que cela pourrait donner à l'Ukraine une position de force, tout en mitigant les craintes d'une pression de la part des États-Unis pour que l'Ukraine cède sur des concessions territoriales.

Concernant la réaction de Donald Trump, le géopolitologue indique que l'équipe de Trump favorise une résolution rapide du conflit, ce qui pourrait le conduire à encourager des concessions de la part de l'Ukraine. Les réactions de la Russie à cette annonce ne devraient pas se traduire par des représailles directes contre les pays de l'OTAN, car les capacités russes sur le terrain sont déjà maximales.

Une question cruciale demeure : la France et le Royaume-Uni suivront-ils l'exemple des États-Unis ? Bounat pense que si les Américains légitiment l'utilisation de missiles sur le territoire russe, alors la France et le Royaume-Uni agiront rapidement. "Il y a eu des réticences précédentes à cause de composants américains dans les missiles. Mais cela pourrait changer si les États-Unis donnent leur feu vert."

Quant à la possibilité d'utiliser ces missiles contre des cibles civiles, l'expert estime qu'il y aura probablement des restrictions sur le ciblage. Bien que le pont du détroit de Kertch soit une cible symbolique, il n’est pas encore confirmé s'il serait dans la liste des objectifs autorisés. Traditionnellement, les États-Unis ont refusé que l'Ukraine attaque directement des cibles touchant le secteur pétrolier en Russie.

En conclusion, même si cette décision marque une nouvelle étape dans le soutien occidental à l'Ukraine, les implications stratégiques immédiates restent à évaluer, et tout événement futur pourrait redéfinir ce tableau complexe.