Science

Les scientifiques doivent-ils se politiser ? Le sommet Science4action soulève la question !

2024-10-08

Auteur: Chloé

Les scientifiques doivent-ils se politiser ? Le sommet Science4action soulève la question !

L'Institut pour la recherche et le développement (IRD) célèbre son 80ème anniversaire en organisant le forum international Science4action, qui s'est tenu le lundi 7 octobre au palais du Pharo à Marseille. Ce forum a attiré l'attention sur un sujet crucial : quel rôle les scientifiques doivent-ils jouer dans le débat public et comment peuvent-ils influencer les défis mondiaux auxquels l'humanité est confrontée ?

Dès les premières heures du forum, l'atmosphère s'intensifie lors de la première table ronde dont le thème est : « Comment les sciences peuvent répondre aux défis de l'humanité ? » Maud Lelièvre, présidente du comité français de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), a fait un constat alarmant : « Les scientifiques ne doivent pas simplement observer la destruction causée par les multinationales dans les pays du Sud, mais s'unir avec ces populations pour exiger des changements. »

Nadine Machikou, une scientifique camerounaise et vice-présidente de l’Association africaine de science politique, renchérit sur cette idée en déclarant que « la science doit être repolitiser, elle a le pouvoir d'adopter un programme décolonial qui reflète les réalités de tous les pays, en particulier ceux du Sud ». Cette notion de décolonisation de la science a un écho personnel et historique, étant donné que l'IRD a été fondé à l'origine en tant qu'Office de recherche scientifique coloniale à une époque où la France entretenait un empire colonial.

Le forum a également mis en avant l'importance d'intégrer des chercheurs du Sud dans la recherche scientifique. Deux tiers des publications de l'IRD sont désormais co-écrites avec des chercheurs de pays considérés comme « du Sud », ce qui représente un avancement significatif vers une recherche inclusive et collaborative.

Un autre point majeur de la discussion était l'influence que les scientifiques pourraient exercer sur l'élaboration des lois. Des questions éthiques cruciales se posent : Un chercheur doit-il dénoncer des lois qui nuisent à l'environnement ? Comment les scientifiques peuvent-ils jouer un rôle dans des décisions impopulaires, comme l'exploitation des ressources maritimes ?

Dans ce contexte, la paléoclimatologue Valérie Masson-Delmotte, lors d'une table ronde intitulée « Dépasser la vision d’un monde ressource », a plaidé pour une science publique forte et indépendante. Elle a souligné l'importance de préserver la liberté d'expression des chercheurs pour garantir que leurs recommandations soient entendues au niveau politique.

Ces réflexions s'inscrivent dans un mouvement plus large : la prise de conscience croissante des scientifiques du monde entier face aux crises climatiques et écologiques. De plus en plus, ils se sentent contraints de sortir de la neutralité traditionnelle de la recherche pour défendre l'habitabilité de la Terre et répondre à l'urgence climatique.

Le forum Science4action n'était pas qu'un simple événement académique ; c'était un appel à l'action. Alors que l'IRD entre dans sa quatrième décennie d'existence, les enjeux de la recherche scientifique et son interaction avec la société se révèlent essentiels pour l'avenir de notre planète. Quelles seront les prochaines étapes pour ces scientifiques engagés ? À l'issue de cet événement, la question se pose : assistons-nous à la naissance d'une nouvelle ère pour la science ?