Divertissement

Marseille : Le « bar Marius », un PMU où l’on « flambe, on boit et on laisse tout le reste à la maison »

2024-11-18

Auteur: Michel

Un trèfle à quatre feuilles décore la façade extérieure, fièrement installé sous les logos de la FDJ (Française des jeux) et du PMU. Perdu au croisement des ruelles Barbini et Toussaint, dans le 3e arrondissement de Marseille, l’un des plus défavorisés de France, si ce n’est d’Europe, le « Bar Marius » est un des derniers bastions de convivialité dans un quartier en déliquescence, victime de la violence liée au narcotrafic.

À l’intérieur, la magie du turf opère sur les deux écrans, captivant les habitués qui, dès l’aube, s’installent pour analyser les courses, acheter leurs tickets, et partager de brèves conversations avec Dominique, la gérante qui anime cet établissement depuis plus de trois décennies.

Un lieu de rencontres entre flambeurs et rêveurs

« Un flambeur, ça ne parle pas », explique Jasmine, une habituée de 40 ans, sa canette d’Orangina à la main. « Ils ont l’esprit totalement absorbé par leurs jeux » ajoute-t-elle, témoignage de l’intensité qui habite ces lieux. Dominique se souvient encore d’un joueur anonyme qui a décroché 1,3 million d’euros juste avant le Covid-19 : « Il est parti sans un mot, laissant tout le monde bouche bée. » Ce bar est également le théâtre d'histoires tragiques, où certains qui ont connu la fortune se retrouvent réduits à l’indigence.

Les clients du « Bar Marius » ne sont pas seulement des parieurs. Sébastien, un fonctionnaire d'État, y vient régulièrement pour se reconnecter avec une classe sociale qu'il estime disparue dans ses bureaux. Le bar est un lieu de vie où chacun, quel que soit son parcours, se croise dans une atmosphère chaleureuse et sans jugement.

Un cadre rustique et des histoires authentiques

Avec son décor minimaliste – un comptoir, quelques tabourets, et des tables prenant l’espace qui reste – le « Bar Marius » incarne l’authenticité marseillaise. Au milieu de ce chaos affectueux, la machine à karaoké et le chat du bar, Boulette, s’invitent à la fête. Un va-et-vient unique s’installe, entre les joueurs avides de victoires et ceux qui ne cherchent que le réconfort d’une tasse de café.

Parler de la vie à Marseille ici, c’est aussi évoquer les rumeurs qui circulent, le voisinage vivant qui apporte son lot d’anecdotes. Ce bar est non seulement un PMU, mais aussi un centre névralgique de rumeurs sur l’actualité, le dernier potin sur le quartier, ou les projets fous d’Elon Musk.

La patronne Dominique a décidé de mettre un terme à son service de restauration, considérant que la cuisine n’était plus rentable à son âge. « Aujourd’hui, avec l’inflation et la crise, les gens serrent la ceinture. » Pourtant, elle continue d’ouvrir son établissement aux aurores, prête à accueillir les innombrables histoires des Matins marseillais.

L’ambiance du « Bar Marius » est également animée par le tumulte extérieur. Un camion de déménagement coincé, des clients qui règlent des petits tracas du quotidien ; chaque jour est un mélange de drame et de comédie humaine que Dominique connait par cœur. Elle a gagné le respect dans cet environnement difficile, sa présence rassurante est appréciée de tous.

En fin de compte, le « Bar Marius » est bien plus qu’un simple PMU : c’est un microcosme où la vie marseillaise s’exprime en toute liberté, un lieu de partages, de joies et parfois de larmes. Dans cet échangisme vibratant de la culture locale, il suffit d'un instant pour comprendre que ici, comme le dit Dominique : « On flambe, on boit et on laisse tout le reste à la maison. » Un lieu où chaque client a une histoire, et où chaque journée est un chapitre de ce livre collectif qu'est Marseille.