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Omer Bartov, historien : « Israël va-t-il enfin comprendre que son pouvoir a des limites ? »

2024-10-07

Auteur: Jean

Le Premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, a affirmé avec détermination qu'il poursuivra la guerre à Gaza jusqu'à obtenir une « victoire totale ». Toutefois, il reste énigmatique quant aux véritables objectifs politiques de ce conflit. Peut-on donc conclure qu'Israël mène cette guerre sans une stratégie clairement établie ? Est-ce une guerre pour la guerre, dépourvue de toute justification stratégique, ou bien Nétanyahou cache-t-il ses intentions pour conserver l'argument de la défense légitime de l'État ?

Nétanyahou semble s'opposer fermement à tout accord de cessez-le-feu ou échange d'otages, craignant que ses alliés d'extrême droite, comme Bezalel Smotrich et Itamar Ben Gvir, ne menacent sa position. En effet, une chute de son gouvernement pourrait engendrer une enquête sur la tragédie du 7 octobre et relancer le procès pour corruption dont il fait l'objet. Cela met en péril sa carrière politique, le poussant à poursuivre son offensive en Gaza et au Liban, particulièrement en période électorale, avec l'espoir que la réélection de Donald Trump durant les élections américaines du 5 novembre pourrait jouer en sa faveur.

Néanmoins, il est crucial de reconnaître que Nétanyahou ne se limite pas à une tactique à court terme. Sa stratégie s'inscrit dans une vision à long terme qui, bien que pouvant présenter certaines variations, rappelle fortement les politiques sionistes antérieures à la création de l'État d'Israël. Cette planification est, en grande partie, responsable de l'impasse actuelle. Dès lors, il est impérieux de remplacer ce modèle par un nouvel paradigme politique pour espérer mettre un terme à ce que certains appellent déjà une « guerre de cent ans » entre Israël et les Palestiniens ainsi que leurs alliés.

Cette situation est enracinée dans un dogmatisme idéologique et un fanatisme religieux qui nourrissent la conviction chez Nétanyahou que la terre d'Eretz Israel, englobant les régions entre le fleuve Jourdain et la mer Méditerranée, appartient exclusivement aux Juifs. L'État d'Israël serait donc uniquement le dépositaire de ce droit historique et moral, justifiant un processus de colonisation incessant basé sur des opportunités militaires et politiques. Dès lors, la population palestinienne est poussée à se conformer à l'hégémonie israélo-juive, ou bien à fuir, lorsque cela est possible.

Alors que cette dynamique se poursuive, la question se pose : Israël réalisera-t-il un jour que son pouvoir et son emprise sur cette terre ont des limites ? Une prise de conscience collective pourrait-elle, finalement, ouvrir la voie à la paix et à une coexistence pacifique ?