«Pour le quotidien du malade, il n’y a personne» : des malades du cancer et leurs familles racontent leur calvaire
2024-11-28
Auteur: Emma
Recueilli par la Ligue contre le cancer, ce témoignage poignant va alimenter un Manifeste qui alertera dès début 2025 sur les graves lacunes dans la prise en charge des patients : restes à charge exorbitants, difficultés financières, délais d’accès aux soins inacceptables, et un manque criant d’accompagnement. Depuis les États généraux des malades atteints de cancer organisés en 1998, plusieurs Plans cancer ont vu le jour, témoignant d'une volonté d’amélioration, mais les résultats restent insuffisants.
Une situation alarmante se profile dans le département de l'Yonne, où Jean-Claude Rodenburger, 77 ans, a été hospitalisé en été 2022 pour un épanchement pleural. Malgré un traitement antibiotique, son état s’est aggravé. Son fils, Fabrice, se heurte alors à un mur lorsqu'il cherche un pneumologue, découvrant que les deux spécialistes de Sens n'acceptent pas de nouveaux patients. Se rendant à Auxerre, à 60 km, il tente désespérément d’obtenir des soins adéquats pour son père, déjà affaibli et ayant perdu 20 kg en un mois.
Un diagnostic de cancer du poumon est finalement posé, mais il faudra deux mois d'errance pour l’obtenir. Fabrice, face à cette détresse, se sent accablé, presque abandonné. L'hospitalisation à domicile demande du temps, et il ne recevra cette option qu'un mois avant le décès de son père, déjà trop peu tard pour un suivi optimal.
Les chiffres parlent d'eux-mêmes : un sondage Ipsos révèle que plus d'un patient sur quatre a déjà dû interrompre son traitement en raison de l'absence de professionnels de santé disponibles ou de médicaments. Ce climat d'angoisse est confirmé par un rapport de l'Académie nationale de médecine qui dénonce des inégalités territoriales qui persistent et lit l’urgence d’une politique active de prévention pour les patients rétablis à risque de complications.
Fabrice témoigne de sa propre souffrance en tant qu’aidant, vivant un véritable enfer pour coordonner les soins de son père. Après une année de lutte, il ressent les effets d'un épuisement psychologique. Le manque de soutien, couplé à des soins non remboursés tels que des consultations de diététicien ou de psychologue, complique encore plus la situation.
Aurélie Gil, 48 ans, éducatrice de profession et elle-même diagnostiquée d'un cancer du sein en 2020, témoigne également : « D’un point de vue financier, il faut avoir un pécule de côté. » Elle évoque la réalité tragique de devoir faire face à des dépenses non remboursées, incluant des soins esthétiques essentiels pour sa dignité, tel un vernis protecteur pendant la chimiothérapie.
Les cancers demeurent la première cause de mortalité prématurée en France pour les hommes et la deuxième pour les femmes, avec des statistiques alarmantes : plus de 433.000 nouveaux cas détectés en métropole en 2023. Une véritable crise de santé publique qui appelle à une action immédiate et adaptée.